L’industrie textile : 1er pourvoyeur d’asthme professionnel en Tunisie

Il y a quelques temps s’est tenue à Tunis une journée technique d’information sur le thème « les technologies de traitement de l’air en rapport avec la réglementation pour la protection de l’environnement et la santé des travailleurs ». Elle a été organisée par les entreprises « Prévention plus »  spécialisée dans le domaine de la sécurité et l’environnement industriel, et « GF Aspirazioni », une société italienne qui est spécialisée dans la réalisation de systèmes pour le traitement de l’air.

Ce fut l’occasion pour les représentants de la CNAM, de l’Agence nationale de protection de l’environnement (ANPE), de l’Institut de santé et de sécurité au travail d’évoquer  le lourd problème des maladies respiratoires professionnelles en Tunisie,  à l’origine de perte d’emplois précoces pour de nombreux salariés.

L’asthme, principale maladie respiratoire professionnelle en Tunisie

L’asthme est  la maladie professionnelle respiratoire la plus fréquente dans le monde et en Tunisie. Elle est  en rapport avec la pollution environnementale professionnelle qui augmente de  jour en jour. Selon les propos du Dr Leila Daly,  médecin à l’Institut de santé et de sécurité au travail,  50% des tableaux des maladies professionnelles sont concernés par les maladies respiratoires. Les maladies professionnelles respiratoires figurent à la troisième place des maladies professionnelles déclarées à la CNAM (entre 14% et 18%), et  l’asthme est la principale maladie professionnelle respiratoire déclarée (2/3 des maladies respiratoires).  Cette maladie est très grave parce qu’elle  peut évoluer vers l’insuffisance respiratoire chronique et être handicapante : le salarié perd son emploi, ) car il ne peut plus travailler et  mènera une vie de personne en situation de handicap.  Il nécessitera souvent une source d’oxygène à portée de mains, plusieurs médicaments  et, s’il a une prise en charge sociale, du matériel pour l’aider à mieux  respirer.

La poussière de textile, à l’origine des syndromes respiratoires

Dans les pays industrialisés les métiers les plus touchés par l’asthme professionnel sont les boulangers (à cause de la farine) les coiffeurs et les agents qui travaillent dans les sociétés de nettoyage à sec. Ces deux dernières catégories inhalant en permanence des produits chimiques. En Tunisie il semblerait que l’industrie textile est le premier pourvoyeur de maladies respiratoires et d’asthme professionnel. Nous n’avons pas de chiffre officiel mais des études scientifiques d’auteurs tunisiens, publiées dans des revues internationales, dont la très réputées EMC (encyclopédie médico-chirurgicale)  sont arrivés  à incriminer  les poussières de textiles dans l’apparition d’asthme chez les travailleurs de ce secteur.

Selon une  étude ayant porté sur l’ensemble des cas d’asthme déclarés dans le secteur privé dans la région du centre tunisien et reconnus au titre de maladie professionnelle durant une période de neuf ans (2000–2008), 219 cas d’asthme professionnel ont été recensés, ce qui a représenté 16,8 % de l’ensemble des maladies professionnelles reconnues durant la période d’étude. L’asthme professionnel a intéressé les adultes jeunes (40 ans) avec une prédominance du genre féminin (67,7 %). Le secteur textile était prépondérant (74,9 %). La majorité des salariés était exposée aux allergènes de haut poids moléculaire (82,3 %) et les poussières de coton étaient le principal agent incriminé (75,3 %).  L’étude qui s’est intéressé au coté social des sujets, a conclut que  la perte d’emploi a été observée chez près de la moitié des salariés (46,6 %) et a été associée à un âge inférieur ou égal à 35 ans et à une ancienneté professionnelle inférieure à 15 ans.

Une autre étude réalisée auprès de 600 apprentis d’un centre de formation professionnelle en habillement de la région de Monastir a montré que 120 d’entre eux, soit 20 % ont présenté des manifestations allergiques respiratoires apparues au cours de l’apprentissage suite à l’exposition aux poussières textiles (exclusivement de coton) avec un test éviction-réadmission positif (quand ils ont été éloignés des poussières de textiles ils n’ont plus présenté de signes respiratoires. Ces derniers sont réapparus dès leur réexposition aux textiles). Les conjonctivites (14,3 %) et les rhinites (8,5 %) ont été les manifestations les plus fréquentes. Vingt-huit apprentis (4,6 %) ont présenté des symptômes équivalents d’asthme. La rhinite était associée à la présence des symptômes d’asthme dans 45 % des cas. Deux cas d’asthme ont été diagnostiqués cliniquement sur les lieux de travail suite à leur exposition aux poussières textiles. Une allergie au coton et à la laine a été notée dans deux cas.

 

En conclusion,  la fréquence des symptômes respiratoires d’allure allergique dans le secteur de textile et habillement et la proportion d’asthme professionnel dans le secteur du textile demeurent élevées.  Des mesures urgentes pour réduire la pollution atmosphérique en milieu professionnel s’imposent.  Selon la représentante de l’Agence nationale de protection de l’environnement, qui a pris part au débat de cette journée, un  décret fixant les valeurs limites à la source des polluants de l’air, est  entré en vigueur depuis septembre 2013.

 

Samira Rekik

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